Pas d’hospitalité ?
L'accueil de la faiblesse de l’autre nous rend-il vulnérables ?
Par Olivier Chiche
«Les étrangers, demandeurs d'asile, travailleurs immigrés clandestins en demande de régularisation, Roms et Gens du voyage, peuples sans terre, individus sans papiers fragilisés par l'exil, menaceraient notre mode de vie et notre bien-être ! Cette misère qui semble supportable au dehors, devient littéralement intolérable au-dedans de nos sociétés. Elle dessine la topologie fantasmée d'un apartheid des forts et des faibles, sur le fond imaginaire d'une « guerre des races » (Foucault), trop éloignées les unes des autres pour vivre-ensemble.
Au loin les faibles, dont on peut à la rigueur avoir pitié, mais « pas de ça chez nous » ! Faut-il porter chez soi, une faiblesse qui n'est pas la nôtre ? N'avons-nous pas assez avec notre faiblesse ? L'absence d'hospitalité serait-elle la condition de notre force ? Le pouvoir de relégation des étrangers témoignerait-il de notre puissance, dont le premier degré serait de choisir qui nous accueillons et qui nous rejetons ?
A ce discours xénophobe qui se banalise, au durcissement dans toute l'Europe des conditions juridiques d'entrée et de séjour des étrangers, on oppose semble-t-il en vain, un discours moral, celui de la tolérance, de la bonne volonté et du devoir d’hospitalité. Mais le discours moralisateur vaut-il mieux que celui de la peur ? L’un et l’autre ne conduisent-ils pas à éviter la difficulté essentielle du vivre-ensemble : celle de vivre et de supporter aussi la faiblesse d’autrui, celle de faire face à ce qui nous semble étranger et qui relève d’abord de l’étrangeté ? Nous voudrions montrer la nécessité première de ne pas éluder la condition d’étranger : nous inscrire dans la difficulté essentielle de l’hospitalité, comprendre qu’elle n’est pas qu’affaire de bien-veillance, de bonne volonté, parce qu'il s’y joue davantage qu’un rapport compassionnel à autrui. A cette condition, l’absence d’hospitalité apparaîtra par-delà le bien et le mal, non comme l’expression d’une force, mais comme le symptôme de la faiblesse d’une société, qui ne peut plus se définir elle-même que dans la négation des autres. On entendra alors que l’accueil des étrangers n’est pas qu’affaire d’hospitalité offerte à autrui, mais de relation à soi-même ».
Lundi 16 mai de 18 à 20 heures, au « Vélocipède », Place Saint Sauveur -
Soirée soutenue par l’antenne de la Radio locale RCF