La maladie est-elle un symptôme de faiblesse ?

Faut-il vouloir la santé à tout prix ? !

Par Catherine Herbert

 

La maladie, la souffrance physique et psychique sont des signes de la vulnérabilité et de la fragilité humaine, que l'on préférera à la notion de faiblesse qui est stigmatisante.

 

En m'appuyant sur trois domaines significatifs que je connais bien – le cancer, l’adolescence, la toxicomanie – je vais tenter de montrer à la fois comment s’y manifeste la fragilité humaine, et comment celle-ci n’est pas pensable si on ne l'aborde qu'en termes individuels. La fragilité qui se manifeste dans la maladie doit, pour être pleinement comprise et pour faire sens, être pensée en termes sociologiques ou anthropologiques : faire de la maladie un problème strictement personnel est une illusion, qui masque la détermination essentiellement sociale de toute pathologie, comme le montre notamment la compréhension de la toxicomanie. Individuellement, le toxicomane peut apparaître comme un faible dont la société devrait se protéger, mais socialement, et même dans la figure du paria, il occupe une place essentielle dans la collectivité, il participe à la société depuis sa place d'autre.

 

Cette dernière idée, mise en perspective par une analyse de notre société dont la consommation frénétique et l'injonction pressante de jouir à tout prix constituent les valeurs et les normes, permettra de comprendre la parfaite intégration des toxicomanes au modèle social dominant.

 

C'est sur ce fond que l'on percevra la genès genèse d'une représentation de la santé comme valeur suprême qui dévalorise la maladie et qui conduit au mépris de toute forme de fragilité. Devenue idéologie dominante, la santé à tout prix apparaît comme un symptôme de maladie politique, et comme négation de la fragilité hors de laquelle aucune humanité ne peut être reconnue.